PÉCHÉ DE JEUNESSE
Par domcorrieras, le dimanche 29 janvier 2023 - Poèmes & chansons - lien permanent
Bien sûr
Demain la vieillesse me viendra.
La vieillesse me viendra
Comme un gouffre malsain
Visité à tâtons
Comme un pipo sculpté
Dans une corne d'homme.
J'y logerai sans joies.
J'y logerai sans joies
Mais je saurai dire non
Au souffle qui macule
Ejaculer les rides
Qui se croiront portées
Cravacherai les lois
Qui se peindront parfaites
Prendrai tous les pavés
Des rues qui se clôturent
En ferai une longue envolée
De flamants et de roses
Bien sûr
Demain la vieillesse me viendra
Bien sûr…
Mais je fondrai dans un abîme
Toutes les poussières de sa foi
Accrocherai des croix
Aux bourreaux de sa guerre
Puis ferai couler du sang frais
Dans sa poitrine offerte.
J'étranglerai sa victoire.
Demain la vieillesse me viendra
Je sais.
Comme un bateau usé
Mon cœur prendra l'eau de partout.
De partout malgré le temps
Il saura bien pourtant
Hurler sa plénitude
Aux voix qui le malmènent
Cracher sa vérité
Aux mirages qui grondent.
Malgré son ciel de nuit
L'acidité de ses fantômes
Saura refaire des courbatures
Au maître de céans huppé
Puis à sa reine en chemise.
Demain
Oui demain la vieillesse me viendra.
Plié comme un géant battu
Caracolant sur les vertiges
Le désespoir fera fortune
Tendue sur ses béquilles
L'abstraction de l'amour
Mentira malgré elle des ripailles
A l'acte sans potence.
Bien sûr
Demain la vieillesse me viendra
Et avec elle aussi
Et malgré moi peut-être
La fin des foutues prétentions
D'un poème du dimanche.
Algrange, 23 août 1970.
Alphonse Pensa / Les mains crépusculaires
Illustration : " Voyage pictural sur la Romance sans paroles de Robert Schuman", peinture d'Alphonse Pensa.