« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

APPARITION


 

 

Où sont les points cardinaux,

Le soleil se levant à l'Est

Depuis mon enfance diurne ?

Mon sang et son itinéraire

Prémédité dans ses artères ?

Le voilà qui déborde et creuse,

Grossi de neiges et de cris

Il court dans des régions confuses ;

Ma tête qui jusqu'ici

Balançait les pensées comme branches des îles,

Forge des ténèbres crochues,

Ma chaise que happe l'abîme

Et se trouver enfin, fraîches les deux oreilles,

Corps galopant au fond de l'aube qu'on réveille.

Jules Supervielle / Le Forçat innocent