« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Qu'il est dur d'aimer ce qu'on aime

 

 

 

Qu'il est dur d'aimer ce qu'on aime
et de s'y tenir arc-bouté
sur notre faiblesse la même
que celle qui nous fait tomber
soit de haine d'indifférence
Qu'il est dur de s'aimer un peu
pour ne pas faire injure aux autres
quand ils disent vous estimer
Sans folle réciprocité
ne quitterait-on père et mère
femmes enfants pour suivre… mais quoi
oui qui nous semble en l'occurence
capable d'un tel lâchez-tout
sinon soi-même quand on tremble
d'avoir retrouvé ceux-là
qui vivent sous nos dépendances
sans déceler nos défaillances
sans en soupçonner la rigueur
Homme et femme ensemble je pense
Voilà le grand malentendu
le piège majeur la souffrance
pour rien et que vient le péché
faire dans cette mascarade
Il est le moindre il est l'été
d'un hiver qui n'en finit pas
féroce en sa simplicité
Nous nous demandons de quoi vivre
sans en pouvoir payer l'écot
nous trompant l'un l'autre Je dis
que c'est toujours tromper soi-même
On ne s'en remet qu'à demi
La chair aiguillonne l'esprit
qui s'en retourne en ses cavernes
ah quel bel avenir vraiment
ont tous les hommes derrière eux.

Georges Perros / Une vie ordinaire
Illustration : Papiers collés de Georges Perros