Visite de la nuit
Par domcorrieras, le mardi 11 juillet 2017 - Poèmes & chansons - lien permanent
Terrasse ou balcon, je posai le pied
A la place exacte où l’on sait toute chose,
J’attendis longtemps, gêné par mon corps,
Il faisait grand jour et l’on approchait.
C’était bien la Nuit convertie en femme,
Tremblante au soleil comme une perdrix,
Si peu faire encore à son enveloppe
Toute errante en soi, même dans son cœur.
Quand il m’arrivait de faire des signes
Elle regardait mais voyait ailleurs.
Je ne bougeais plus pour mieux la convaincre
Mais aucun silence ne lui parvenait.
Ses gestes obscurs comme ses murmures
Toujours me voulaient d’un autre côté.
Quand baissa le jour, d’un pas très humain
A jamais déçu, elle s’éloigna.
Elle rejoignit au bout de la rue
Son vertige ardent, sa forme espacée.
Comme chaque nuit elle s’étoila
De ses milliers d’yeux dont aucun ne voit.
Et depuis ce jour je cède à mes ombres.
Jules Supervielle / Les amis inconnus