« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Chanson de Fortunio

 

 

 

Si vous croyez que je vais dire
        Qui j'ose aimer,
Je ne saurais, pour un empire,
        Vous la nommer.

Nous allons chanter à la ronde,
        Si vous voulez,
Que je l'adore et qu'elle est blonde
        Comme les blés.

Je fais ce que sa fantaisie
        Veut ordonner,
Et je puis, s'il lui faut ma vie,
        La lui donner.

Du mal qu'une amour ignorée
        Nous fait souffrir,
J'en porte l'âme déchirée
        Jusqu'à mourir.

Mais j'aime trop pour que je die
        Qui j'ose aimer,
Et je veux mourir pour ma mie
        Sans la nommer.

Alfred de Musset / Poésies nouvelles
Illustration : Alfred de Musset, autoportrait