« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

chili et haricots

 

 

 

pendez-les tête en bas lors de nuits abondantes,
brûlez-leurs enfants et molestez leurs plantations,
tranchez les gorges de leurs femmes,
tirez sur leurs chiens, cochons et servantes ;
ce qui survit, faites-en des esclaves ;
vos politiciens feront de vous des héros,
des cours internationales de justice décréteront
que vos victimes sont coupables ;
vous serez honoré, recevrez des médailles,
des pensions, des villas le long de la rivière
avec un choix prioritaire sur les futures
prostituées ;
les prêtres ouvriront les portes de Dieu
rien que pour vous.

la victoire est la seule chose qui compte,
ça l'a toujours été ;
et personne n'a l'obligation de s'en soucier
personne n'est censé en avoir quelque chose à foutre

la sexualité et l'amour sont évacués…
comme de la merde

tout le monde s'en branle

apprends-le

croire en l'impossible est un
piège
la foi tue

tout le monde s'en balance —
les suicidés, les morts, les dieux
ou les vivants

pense au vert, pense aux arbres, pense
à l'eau, pense à la chance et à la gloire de
toute sorte
mais garde-toi
le plus tôt possible
de dépendre de l'amour
ou d'attendre qu'on t'aime
en retour

personne n'en a rien à foutre.

 

Charles Bukowski / Tempête pour les morts et les vivants
traduit de l'anglais (États-Unis) par Romain Monnery
illustration : Charles Bukowski par Hakan ARSLAN 2012