EUX
Par domcorrieras, le mardi 14 février 2023 - Poèmes & chansons - lien permanent
parfois me rejoignaient
au bout
du monde
Guatémaltèques passeurs de paroles nouvelles
vous étiez alignés sur les montagnes rouges
comme es enfants qui doivent
retourner à l'école
Sur le dos des boucs en terre cuite
l'encens que vous aviez allumé
avant votre massacre
brûlait encore
et mon ami de Biskra endormi sous le palmier
est-ce Camille ou Denis dont a maison du ciel
continue à changer d'adresse ?
et mon ami de Constantine ?
et les autres ?
de quelle planète parallèle
viennent leurs tombeaux qui creusent la terre
et que la terre engloutit ?
À travers nos slogans et nos croyances
nous étions tous des satellites
porteurs de centaines de morts
incapables de partager entre eux
leur au-delà
Notre siècle qui es sur terre
que ton nom soit apaisé
mais que ta révolte arrive
paroles du berger
qui perdu dans l'orage trouve son troupeau
multiplié
par les dix mille noms
qui veillent sur la terre
Au nom du père que nous sommes tous car la père
c'est toujours l'autre
À l'allumette qui frotte, prend feu et se consume
À la lampe qui guide les pas du jour
Aux mirages que le désert traque
mais que les points d'eau suivent
Aux sept mers dans lesquelles le ciel devient
amertume pour renaître dans le sel
Aux moteurs qui installent notre immobilité
sur une autre trajectoire
Aux perturbations qui transforment les paraboles
en ellipses, les ellipses en silence, et le silence en
anathème lancé par l'enfant qui vient de naître
Aux rêves que l'on conquiert avec un sac d'outils
comme oreiller
À la face ravagée du soleil et à la face ravagée des
lutteurs qu'elle écrase
Aux étoiles lorsqu'elles deviennent balles de fusil
pour reculer les incertitudes et les agrandir
Aux horloges devenues projets d'hommes mûrs
aux grands surmenés à parole d'oiseaux nocturnes
À la femme, à tous les convois du grand jour qui
partent vers elle
À l(enfant dressé contre son image de ciel
Je dis OUI — (satellite habité)
OUI — mais autour de
quelle autre compréhension des
choses, ce oui tourne-t-il déjà ?
Armand Gatti / MORT-OUVRIER (extrait)