« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

UN AGE OÙ


 

 

Il doit y avoir un âge où l’on se pacifie.

Où l’angoisse et le doute ne guident plus

nos pas. Mais peut-être que cela n’arrive pas,

que l’on ne grandit jamais, finalement.

 

Je me demandais ce qui était le plus dur :

un mot ou une pierre.

 

Lorsque, sur scène, la parole devient litanique,

que le rythme s’enfièvre, je sens en moi

le reflux du sang, violent, et ce rythme passe

à l’intérieur de mon corps, il me prend,

me remplit, m’assouplit, me malaxe, tambourine

contre ma peau, la parole est ma parole

et sa fièvre est ma fièvre, mes cordes vocales

s’ébranlent et tressautent sur la poussée d’un cri.

 

Hululement de la chouette.

 

La langue d’un loup qui lape un filet de sang

sur la carcasse d’un petit mammifère.

Ophélie Jaësan / La Mer remblayée par le fracas des hommes