« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Maintenant

 

 

 

 ◼︎ Enfant tu rêvais
Que rien n'allait plus changer.

Qu'un brin d'herbe
Resterait là pareil à lui-même.

Figé
Dans un instant d'éternité,

Sous la cloche du firmament,
Porté par la lumière
Émanée de quel au-delà ?

Tu te sens assez bien
Comme le pépin d'une reinette.

En train
D'apprendre à mûrir.

Tu n'as pas réussi
À faire de tous les instants de ta vie
Un miracle.

Essaie encore.


À quoi je sers
Se chante l'alouette ?

J'ai beau monter,
Grisoller, tourner, descendre
Et remonter et regrisoller,

Alors qui fait mieux ?
Qui ne se plaint pas
De ne rien changer à rie ?

Mais je suis, je suis
Je fais vibrer avec moi
Ce qui m'entoure.

Ce bol devant toi,
Qu'est-ce qu'il veut ?

Mais d'abord,
Est-ce qu'il veut ?

Il te semble que oui.
Il te semble qu'il te parle.

Qu'il a besoin que tu fasses
Quelque chose pour lui.

Il te semble
Et tu en es presque sûr.

Pourtant, si c'était toi
Qui te parlais à travers lui ?

Mais peu importe,
Dis-lui que tu l'entends,

Qu'il est ton compagnon,
Ton petit frère.

Encore maintenant
Tu vois la lune
Te regarder comme si

Elle enviait ton œuf
Dans ton coquetier. ◼︎

 

Eugène Guillevic / Maintenant
Photo : Eugène Guillevic / Gamma-Rapho via Getty Images / Louis MONIER