« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Alger, 1er février 54 - 4h à5 du matin

 

 

 

     Mon âme, mon corps, ma peau, mes soucis. Toujours, partout, parler de moi, de moi. Et le poème, le culte encore de moi. Peut-être puis-je échapper à cette maladie par des travaux communs, la revue, mes poèmes politiques — et le théâtre surtout. J'adore les autres : plaisir de gourmet, certes. Mais ce qui est plus profond : j'aime les autres. « Avec les corps que nous avons nous ne pouvons pas vivre sans les copains », dit Van Gogh (après Jésus). J'écris cela pour me justifier, pour qu'un jour les autres le sachent, car je sais qu'on m'accusera, qu'on me calomniera.

 

Jean Sénac / Journal d'Alger - Janvier-Juillet 1954 (extrait)