je t'ai mis pour partir tes derniers vêtements

tu n'étais pas bien lourde en ce matin d'été

je te voyais ainsi pour la première fois

mais je n'ai pas voulu de leurs mains étrangères

je t'ai mis pour partir tes plus beaux vêtements

ton parfum préféré tes souliers à talons

une pierre d'un bleu marine et j'ai mis près de toi

un bouquet d'immortelles et de bruyères séchées

je t'ai mis pour partir tes vêtements de pluie

puis j'ai refait tous nos chemins tous nos voyages

la jetée du Moulleau et les dunes du Pyla

Notre-Dame-des-Passes et les plages de la guerre

je t'ai mis pour partir tes vêtements de source

puis on t'a descendue lentement dans le sable

tu n'étais pas bien lourde en ce matin d'été

te voilà maintenant dans les grandes marées…

La Teste, le 4 août 1984

Tristan Cabral / Le passeur de silence