« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Maisons blanches


 

 

Maisons blanches, toutes blanches,

les tuiles abricot,

les volets bleus,

les chevaux cannelle dans la cour,

les blancs dans le champ vert

les balcons d’or et la mer.

 

Les mules sur la pente dans les pierres

et les petits ânes dans les épines,

nattes de paille, couteaux et panières,

et rires

dans les vignes.

 

Doigts et genoux,

poitrines et mentons

ensanglantés dans le raisin,

cris rouges et sueurs,

dans les descentes

le gloussement doré de la poule.

 

Et comme bleuit le soir

petit à petit,

mauve puis violet,

voilà aussi la Sainte Vierge

sur la grand-route

à côté des charrettes, des clochettes,

des cruches

et des mouchoirs brodés

la voilà la Sainte vierge

et dans son tablier d’argent

dix livres de raisin rouge.

 

Et toi seul,

fier comme un cyprès,

seigneur des sombres palais des eaux,

tu t’assieds à l’écart,

face aux clochers,

sur la crête de la compassion

et de la solitude,

et tu égrènes sur tes genoux

les grosses grappes

des étoiles.

Yànnis Rìtsos / Jeux du ciel et de l’eau
traduit du grec par Michel Volkovitch