« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Le Bœuf ou le Mulet

 

 

 

 

Un chœur entonnait un cantique magnifique,

et chantant il entra, et quand il eut fini,

j’interrogeai un des choristes pour savoir

quelle était cette œuvre ainsi qu’ils exécutaient.

Il me montra un livre au dos duquel était

un écusson où l’on pouvait lire « Orléans »,

l’ouvrant, il me fit découvrir la partition :

« Comment s’appelle, dis-je, le compositeur ? »

« C’est un anonyme qui mit à quatre voix

la peine des pauvres gens, me répondit-il,

et pour cette raison on l’appelle “Le Bœuf”

ou “Le Mulet” ». Cependant je me demandais

et admirais comment un simple homme du peuple

avait pu composer tant de choses si belles

dont était rempli tout ce livre, j’en étais

presque à pleurer. Soudain, le chœur reprit le chant

de ce compositeur, début du Dix-Septième,

et timidement je me mis sur le côté

en ressentant malgré moi de la jalousie

pour ces gens qui rendaient ces splendeurs avec tant

de naturel, tant de puissance et de beauté.

William Cliff / Amour perdu