« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

QU'EN AVEZ-VOUS FAIT ?

 

 

 

Vous aviez mon cœur,
Moi, j'avais le vôtre :
Un cœur pour un cœur;
Bonheur pour bonheur !

Le vôtre est rendu;
Je n'en ai plus d'autre.
Le vôtre est rendu
Le mien est perdu.

La feuille et la fleur
Et le fruit lui-même.
La feuille et la fleur.
L'encens, la couleur :

Qu'en avez-vous fait.
Mon maître suprême ?
Qu'en avez-vous fait.
De ce doux bienfait ?

Comme un pauvre enfant.
Quitté par sa mère,
Comme un pauvre enfant.
Que rien ne défend :

Vous me laissez là,
Dans ma vie amère ;
Vous me laissez là,
Et Dieu voit cela !

Savez-vous qu'unjour,
L'homme est seul au monde ?
Savez-vous qu'un jour,
Il revoit l'amour ?

Vous appellerez.
sans qu'on vous réponde.
Vous appellerez :
Et vous songerez !…

Vous viendrez rêvant.
Sonner à ma porte ;
Ami comme avant,
Vous viendrez rêvant.

Et l'on vous dira :
« Personne. elle est morte. »
On vous le dira :
Mais qui vous plaindra !

 

Marceline Desbordes-Valmore Pauvres Fleurs, 1839)