« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

LE MONTAGNARD EXILÉ


 

 

Combien j’ai douce souvenance

Du joli lieu de ma naissance !

Ma sœur, qu’ils étaient beaux les jours

                De France !

Ô mon pays, sois mes amours

                Toujours !

 

Te souvient-il que notre mère

Au foyer de notre chaumière

Nous pressait sur son cœur joyeux,

                Ma chère,

Et nous baisions ses blancs cheveux

                Tous deux ?

 

Ma sœur, te souvient-il encore

Du château que baignait la Dore,

Et de cette tant vieille tour

                Du Maure,

Où l’airain sonnait le retour

                Du jour ?

 

Te souvient-il du lac tranquille

Qu’effleurait l’hirondelle agile,

Du vent qui courbait le roseau

                Mobile,

Et du soleil couchant sur l’eau,

                Si beau ?

 

Oh ! qui me rendra mon Hélène,

Et ma montagne, et le grand chêne ?

Leur souvenir fait tous les jours

                Ma peine !

Mon pays sera mes amours

                Toujours !

François-René de Chateaubriand / Le dernier des Abencérages