Anges, épars dans l’air
Par domcorrieras, le samedi 4 novembre 2017 - Poèmes & chansons - lien permanent
Anges, épars dans l’air,
Qui n’avez pas de chair,
Enviez-nous nos corps
Prisonniers en dehors
Des célestes prairies,
Ou légers, transparents
(Nous lourds, malodorants),
Vous tenez-vous toujours
À distance du cours
De nos effronteries ?
Qu’est-ce qu’être formé
De ce tuf animé
Par un Dieu qui créa
D’abord l’ange béat
Mais sujet à colère,
Au tourment de l’orgueil,
À la révolte, seuil
D’un plongeon sans salut
Vers un autre absolu
dans un temps circulaire,
Alors que nous mêlons,
Fidèles ou félons,
Au pire le meilleur
Dans un temps gaspilleur
Qui nous use et divise ?
Tant et si bien qu’enfin
Démon et séraphin
En nous recommençant
Par l’amour et le sang
Une lutte indécise,
Lequel de nous saura
S’il fut saint, scélérat,
Apostat ou martyr,
S’il dit vrai pour mentir,
Alla droit par l’oblique ?
Il vous faudrait un corps
Pour battre nos records
Dans le doute qui rend
Ce dont reste ignorant
L’ange : mélancolique.
Jacques Réda / Démêlés / L’ascension
photo : Jacques Réda © Jean-Luc Bertini