« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Hélas ! je l’sais bien qu’c’est la fête


 

 

 

XIV
 

Hélas ! je l’sais bien qu’c’est la fête
Et que l’temps d’aimer il est v’nu
Qu’y fait mêm’ bon d’aller tout nu
Avec au bras eun’ gigolette,

Pour fair’ la culbut’ dans les foins
Sans culbutants et sans témoins !
Mais outr’ que j’suis pas trop mal frusqué
J’ai pas d’pèze pour en embarquer,

Aucune a vourait d’ma tristesse :
Seigneur ! vous avez d’l’instruction
Porquoi qu’y en a qu’ont des maîtresses
Malgré qu’y n’aient pas d’position  ?

J’am’rais ben moi aussi mon Gueiu
Avec les gars qui sont au sac
(Sans pour ça m’’fair’ mignonne ou mac)
Vivre en donzelle et en joyeux !

Et m’les traîner dans des bagnoles
Pour m’foutre avec euss des torgnioles
A coup d’bouquets d’fleurs su’ le citron
(Mais v’là ! y s’trouv’ que j’ai pas l’rond !)

J’suis l’fils des vill’s, non d’mon village
Si j’ai des envi’s, des besoins
C’est la faute aux grands magasins
A leurs ménifiqu’s étalages.  

Jehan Rictus / Les Soliloques du pauvre / III - Prière (extrait)