« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

ARTAUD RIMBUR

 

 

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Écrire, c’est ça !

C’est d’abord découvrir qu’on a, en nous, ce trou d’mort à langues trouées où s’entassent, pêle-mêle, ces langues de tiraillous du Tchad ou de cajuns des bahous, cousins des ex-bat. d’Af., eux-mêmes matassins négropolitains des rastas de squatts, matachés de oualongadoudous, comme chez nous, à Gembloux !

    C’est comprendre et aimer ça quitte à avoir l’air d’avoir trop soufflé dans l’encrier du nec sous-ultra ! — et, dans le même temps, c’est accomplir, ce geste insensé, de noria dans le nada ! C’est accomplir l’inlassable monotonie résistante de cet acte fou !

    C’est faire et aligner des bâtons !

C’est en baver des chuintés et en chier des mous ! C’est chier dans ce trou ! C’est devenir, soi-même, un bâton ! Être le bâton cochon de ce corps — mal fait, mal conçu, mal planté et mal baisé ! — qu’on nous a cochonné ! C’est tenter, jour après jour, d’en esquisser le contour et d’en déboucher le brouillon ! Tenter d’actionner — avec une folle envie concomitante de tout bousiller — cette saloperie de colonne à pression qui nous sert de prothèse à langue ! C’est tenter de l’amocher ! De l’écrabousiller ou d’en boucher le daleau ! De la bourrer ou mâchurer de mots ! De la barbouiller de bamboula ! De la peinturlurer, aux couleurs, très peu françaises, de ce qui en sourd ou s’y tait, dans l’hystérie crispée d’une motilité sans nom !

    C’est tâcher de mettre des noms là-dessus !

    Tâcher de dénouer ce rébus et de désigner cet os,
    par où

    et par quoi,

    on l’a dans l’os !

Jean-Pierre Verheggen / Artaud Rimbur (extrait)