« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

À la fin d'une permission en temps de guerre


 

 

Je jette mes vieux bâtons de randonnée

Dans l'herbe mouillée,

C'est à crever,

J'en ai les larmes aux yeux.

De nouveau, il faut que je parte,

De nouveau, que je prenne congé,

Que je fasse ce qui me plaît —

Quand me cernent le bleu des cieux,

Ruisseau, prairie et ravines,

Et toute la musique et la lumière du monde !

 

De nouveau, il faut que je me décide,

De nouveau que je souffre du mal du pays

Et fasse des choses qui me sont étrangères,

Pendant que dans mon cœur

Les sombres douleurs tissent leurs toiles

Et que gisent des rêves en or à moitié brisés.

 

Je crache en silence dans un buisson,

Vous tous qu'il me faut servir, c'en est trop,

Ministres, excellences, généraux,

Que le diable vous emporte !

Hermann Hesse / C'en est trop - Poèmes 1892-1962
traduit de l'allemand par François Mathieu