« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Le monde


 

     Le monde, vous le savez, est tout rempli de signes. Même les oiseaux avec leurs pattes écrivent des hiéroglyphes compliqués sur le sable.

     Les traces humaines sont dans l'ensemble peu profondes, fragiles et incertaines. assez insistantes toutefois pour modifier la forme du paysage.

     Il y a les routes, les villes, beaucoup de cheminées d'usines, des plantations d'arbres, des jardins, des prairies découpées, des champs de maïs, de colza, de coton ou de riz. Il y a aussi des cimetières, avec des pierres couchées, debout, penchées, des croix parfois, des fleurs en plastique ou qui se fanent, de petits Christs de fer blanc aux bras brisés.

     Il n'est pas sûr que ces traces durent longtemps. Il faut, pour en garder mémoire, beaucoup plus que des tas de pierres ou des livres rangés dans des bibliothèques. Il faut des hommes qui s'en souviennent et des enfants pour les apprendre. Beaucoup de silhouettes penchées sur des pages, avec un crayon, une plume ou un pinceau.

Jean-Michel Maulpoix / adieux au poème (extrait)