« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

La neige tournoie


 

 

… / …

 

4

 

La neige tournoie, le clocher crie,

Le Vania vole et la Katia avec lui —

Electrique, un lampion

Sur chaque timon…

Attention, ah, attention !

 

Lui, dans sa capote de soldat,

Avec sa tête d’idiot,

Sa moustache noire, il la tortille et la tortille,

Et comme ça s’entortille

Et comme ça t’embobine…

 

Voilà, le Vania, c’est ça — du baraqué !

Voilà, le Vania, c’est ça — du baratin !

Cette idiote de Katia, il la prend dans ses bras,

Il lui fait son bla-bla…

 

Elle a jeté en arrière sa tête,

Comme des perles, ses dents brillent…

Ah toi, Katia, ma Katia,

Ma grosse bouille…

 

 

5

 

Sur ton cou, Katia, elle n’a pas guéri,

La cicatrice du coup de couteau.

Sous ton sein, Katia, elle est là,

Cette créature, encore fraîche !

 

Hop hop, danse voir un coup !

Comme elles y vont, tes gambettes, c’est fou !

 

Tu faisais la belle en linge à dentelles —

Fais donc la belle, allez, fais donc la belle !

Tu te traînais avec des officiers —

Fais la traînée, allez, fais la traînée !

 

Hop hop, fais la traînée !

Dans la poitrine, le cœur a sauté !

 

Tu te souviens bien Katia, l’officier —

Lui ne l’a pas évité, le couteau…

Ou tu ne te souviens de rien, bon sang ?

Ou c’est ta mémoire qui n’est plus fraîche ?

 

Hop hop, rafraîchis-la !

Qu’on puisse un peu coucher avec toi !

 

Tu portais des jambières grises,

Tu bouffais du chocolat Mignon,

Tu faisais la bringue avec le junker —

Maintenant tu la fais avec le soldat ?

 

Hop hop, donne dans le péché !

Pour l’âme alors, tout devient léger !

 

… / …

Alexandre Blok / Douze (extrait)