MYSTIQUE
Par domcorrieras, le samedi 27 juillet 2019 - Poèmes & chansons - lien permanent
L’air est tissé d’hameçons,
Zébré de questions sans réponse,
Comme des taons, étincelants, saouls,
Dont les baisers virulents brulent
Dans le ventre fétide et noir de l’air d’été sous les pins.
Je me souviens
De l’odeur morte du soleil sur le bois des cabines,
De la raideur des voiles, des longs linceuls de sel.
Dès lors qu’on a vu Dieu, quel remède ?
Dès lors qu’on est monté au ciel
Sans avoir rien laissé de soi,
Pas un doigt, pas un os — usé
Jusqu’à la moelle, usé dans les brasiers du ciel,
Les traînées rayonnantes autour des cathédrales —
Quel remède ?
Le cachet à prendre à la Sainte Table,
La marche au bord des eaux ? La mémoire ?
Ou l’art d’assembler les reflets du Christ
Sur le faciès des rongeurs,
Radoteurs, gobeurs de bluettes
Aux espoirs si bas qu’ils en sont confortables —
La bossue dans sa maisonnette
Aux petits murs blancs sous les clématites.
Et nul grand amour, rien que la tendresse ?
La mer se souvient-elle
De celui qui marchait sur elle ?
Le sens découle des molécules.
La vitre sue, les cheminées respirent sur la ville,
Les enfants sautent sur leurs lits.
Le soleil fleurit, c’est géranium.
Le cœur ne s’est pas arrêté.
Sylvia Plath / Arbres d’Hiver
traduction de Françoise Morvan et Valérie Rouzeau