« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Route noire

 

 

 

Route noire en lacets,

Il tombe une pluie fine.

Quelqu’un s’est proposé

De me reconduire.

Je consentis et j’oubliai

De jeter un regard,

Ce fut si étrange ensuite

De se rappeler la route,

Le brouillard

Comme de l’encens tombé

De mille encensoirs.

Mon compagnon de voyage

En chantant me ravivait le cœur.

Je me souviens de portes anciennes

Et de la fin de notre chemin.

Nous étions venus là-bas,

Il m’a dit : « Pardon… »

Me remit une petite croix

De cuivre, tel un frère…

Et j’entends tout autour une chanson de steppe.

Ah, c’est chez moi et pas chez moi —

Je pleure et ‘afflige.

Cher inconnu, nomme-toi,

Je te cherche.

 

 

 

1913

 

Anna Akhmatova / Volée blanche