LE GRAND DISEUR ÉVOQUE LE SOLEIL
Par domcorrieras, le dimanche 14 octobre 2018 - Poèmes & chansons - lien permanent
Salut, ver arpenteur du ciel,
creuset où fond la poudre
de la lumière en mouvement !
Salut, ver arpenteur des mers,
grand miroir où fusionnent
l’eau et le sel en mouvement !
Salut, ver arpenteur du temps,
sablier où fusionnent
le jour et l’ombre en mouvement !
Le soleil salue le poisson,
il lui apprend comment il est,
au gazouilleur
il dit :
« Ne te prends pas pour une fleur »,
l’oiseau le sait,
mais n’est-il pas possible de rêver ?
D’être en rêve fleur ou bateau ?
Le soleil fixe le bouleau,
il lui apprend comment il est,
mais à quoi bon se réveiller
si l’on rêvait
u’on était ciel nuitamment bleu ?
Le soleil salue la gazelle,
il lui apprend comment elle est :
pour voler elle n’a point d’ailes
mais quatre pieds…
Le soleil salue l’homme,
il peint son ombre, en somme
il lui apprend comment il est…
Le soleil salue le soleil
en se copiant dans l’eau des mers,
il ignore comment il est,
car si dans le ciel il marche à l’endroit
sur la mer il marche à l’envers…
Le soleil salue le poisson,
l’oiseau,
l’homme,
le bouleau
qui sont autrement qu’ils ne sont.
Le soleil se salue lui-même
en ignorant comment il est…
Miguel Ángel Asturias / Le Grand Diseur