« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

XX- JE SUIS D’IRLANDE


 

 

 

 

 

« Je suis d’Irlande,

De la sainte terre d’Irlande,

Et le temps fuit, inexorable, criait-elle,

Venez par charité, venez

Danser avec moi en Irlande. »

 

Un homme, un homme seul

Dans cet accoutrement incongru,

Un homme solitaire

Parmi tous ceux qui flânaient là

Avait tourné sa tête majestueuse.

« C’est un long chemin pour s’y rendre

Et le temps fuit, inexorable, dit-il,

Et la nuit se fait inclémente. »

 

« Je suis d’Irlande,

De la sainte terre d’Irlande,

Et le temps fuit, inexorable, criait-elle,

Venez par charité, venez

Danser avec moi en Irlande. »

 

« Les violoneux sont maladroits,

Ou les cordes des violons sont exécrables,

Les tambours et les timbales

Et les trompettes sont tous crevés,

Et le trombone », cria-t-il

En clignant méchamment de l’œil,

« La trompette et le trombone,

Mais le temps fuit, s’enfuit, inexorable ! »

 

 « Je suis d’Irlande,

De la sainte terre d’Irlande,

Et le temps fuit, inexorable, criait-elle,

Venez par charité, venez

Danser avec moi en Irlande. »

William Butler Yeats / L’escalier en spirale et autres poèmes
traduit de l’anglais par Jean-Yves Masson