« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

LA LUNE FOLLE


 

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Folle d’avoir porté trop d’enfants,

La lune dans le ciel titube ;

Frappés de déraison par les regards désespérés

De son œil qui divague,

Nous cherchons à tâtons, toujours en vain,

Les enfants nés de sa souffrance.

 

Enfants faibles d’esprit ou morts !

Quand dans tout son orgueil virginal

Elle foula pour la première fois le haut de la montagne,

Quelle agitation parcourut la campagne

Où tous les pieds obéissaient à son regard !

Quelle virilité menait la danse!

 

Gobe-mouche de la lune,

Nos mains blêmissent, nos doigts

Semblent de fines aiguilles d’os ;

Ce rêve malfaisant les fait blêmir,

Elles sont largement ouvertes afin que chacune

Puisse attraper ce qui passe à sa portée.

William Butler Yeats / L’escalier en spirale et autres poèmes