ROGER
Par domcorrieras, le samedi 29 mars 2008 - Poèmes & chansons - lien permanent
Longue queue dorée et riche fourrure,
Roger est un angora blanc
Que j’adore et qui fait semblant
De me payer d’amitié pure.
Je l’appelle; à peine il m’entend.
En boule roulé sur sa chaise,
Ce matin, il n’est pas à l’aise,
Et me regarde en m’évitant.
Il a commis quelque sottise :
Sans doute il a fait un larcin,
Ou peut-être est-il l’assassin
D’un jeune serin qu’il courtise !
Voyons, Monsieur, confessez-vous :
Pourquoi cette patte est-elle noirâtre,
Et d’où vient la tache rougeâtre
Qui salit votre poil si doux ?
J’ai trop souffert de vos caprices.
Vous méritez un châtiment,
Et vous aurez certainement
Le fouet pour toutes vos malices.
Mais Roger se dresse indolent,
Me jette un regard en coulisse,
Tend son dos pour que je le lisse,
Et se rallonge somnolent.
Or qu’a fait ce flaireur d’assiettes,
Ce sournois, ce fripon fieffé ?
Pour me dérober mon café,
Il a mis ma vaisselle en miettes !
C’est trop fort, petit scélérat :
Je lève la main. – Il dit grâce.
Au lieu de le frapper, je l’embrasse.
– Il faut bien corriger son chat !
Marie LeBlanc (1867-1915), poétesse de l’île Maurice.
Illustration : Le Soleil de Juillet, 1900
Revue publiée par Mademoiselle Marie LeBlanc