« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Dressé sur les restes de vie

 

 

     Dressé sur les restes de vie d'un homme noir.
Ou volant dans la vallée qui sépare le jour de la
nuit.
     « Je suis la Mort », s'écriait le vautour. «  Pour le
peuple de la lumière. »

     Charon ramena sa barque de la mer qui roule
sur les âmes,
     Et il vit le charognard qui s'en allait, emportant
des cœurs encore chauds vers la froidure.
     Il savait que le ghetto était un havre pour la
créature la plus vile qu'on ait jamais connue.

     Dans les terres sauvages du chagrin et le désert
du désespoir,
     Le mal souffle dans le clairon de justice qui
lance un cri strident de terreur nue.
     Arrachant le nourrisson à sa mère, semant une
douleur à nulle autre semblable.

     Alors; si tu vois venir le vautour, si tu le vois
décrire des cercles dans ta tête.
     Souviens-toi que toute fuite est impossible, car
il restera toujours derrière toi, tout près.
     Promets-moi seulement de livrer bataille ;
bataille pour ton âme et pour la mienne.

 

Gil Scott-Heron / poème d'introduction à son roman "Le Vautour".