« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

La croix verte d'une pharmacie

 

 

La croix verte d'une pharmacie.
Une femme fume près d'un lampadaire.
Elle arrange sa coiffure.
Elle s'examine dans une vitrine :

c'est d'un cancer de la gorge
c'est d'une MST,
ou bien, c'est de soi-même.
Ne pas penser, surtout aux efforts secondaires :
l'amour, la distance, la mort.
Au fleuve, qui s'échappe, pour menacer les digues.

Les lumières d'un tramway
traversent ses pensées.
Là-bas, sur l'une des places, danse un fakir au teint sombre.

Les lumières disparaissent, et on constate à nouveau
Qu'à Rome il fait mauvais.
Personne dans la rue.
L'ange, clochard sans chaussettes,
Gèle éternellement au sommet du Château.
Triomphateur de la peste,
gardien de but aux pieds nus,
il y a malheurs pires.
Tu as une épée de fer
et une aile,
moi, je réduis les voyelles étrangères,
elles pointent dans la prière comme des os, comme des pieux,
attends-moi au coin,
nous allons nous partager cette nuit.
pourtant, voici une fenêtre où brille un semblant de lumière.
La femme appuie sur « Enregistrer »,
mais la lumière s'échappe et disparaît.

Seule la braise incandescente de la cigarette
lui rappelle, perdant son éclat,
l'événement qui s'est produit voici une seconde,
puis tout retombe dans l'obscurité.

 

Alexandra Petrova