« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

PAN !


 

 

PAN !

l'homme est tombé

là-bas à l'orée du village

Depuis que je tournais aux quatre vents soufflant

ni sur d'antiques arcs romans

ni sur des ogives gothiques ridées

— simplement parée de vertus modestes et plus

    récentes

sur un clocher au cœur des disputes —

c'était mon premier mort, je crois. Il y avait eu

 

les forçats de pierre de taille

les excommuniées aux ongles acérés

les bêtes de somme et de trait

les chemins de poussière

les serfs aux mains et pieds calleux

les paysans télévisés

les uniformes rayés, unis ou à pois

les cercueils hermétiquement clos

les abeilles désorientées

les chemisiers qui frétillent au vent

les frontières remodelées à l'envi

les tabellions chafouins

l'asphalte brûlant

les visiteurs cylindrés

les écouteurs vissés

et que sais-je encore ? pendant

 

ces siècles clairsemés, sous mon perchoir

les vies se sont succédé

— misérables, sereines ou finalement emboîtées —

 

Embusqué, le tirailleur

faisait trembler de ses coups

le bronze qui m'a fondue. Me marteau

inexistant des cloches vacillait

d'un mouvement primesautier. Croire

à la destruction semblait une chimère.

     Et pourtant…

En moi d'apparence impassible résonnaient

les harmoniques assourdies d'un concert

de louanges à la nation souveraine

que ma flèche pointait

aux vents dominants

 

mais laquelle ?

Florent Toniello / FLO[T]S