« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Le bruit sourd


 


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     Le bruit sourd répété des bûches sur le pavé des cours. Elles étaient déchargées des charrettes, une maison après l'autre, dans l'imminence du froid. Le bois tombe par terre et annonce l'hiver. Baudelaire veille. Il n'est besoin de rien d'autre que cette sonorité — sourde, répétée. Le soleil sait déjà qu'il va être vite emprisonné « dans son enfer polaire ». C'est comme d'ausculter une respiration laborieuse : « J'écoute en frémissant chaque bûche qui tombe. »

 

     Anatole France racontait avec l'aimable scepticisme qui parfois l'empêchait de comprendre, qu'un jour un officier de marine avait montré à Baudelaire un manitou africain. « une petite tête monstrueuse taillée dans un morceau de bois. — Elle est bien laide, dit le marin. Et il la rejeta dédaigneusement. — Prenez garde ! dit Baudelaire inquiet. Si c'était le vrai dieu ! ». Ce fut sa plus ferme déclaration de foi.

Roberto Calasso / La Folie Baudelaire (extrait - explicit)