« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

LXXI


 

 

Les lys me semblent noirs, le miel aigre à outrance,

     Les roses sentir mal, les œilletz sans couleur,

     Les mirthes, les lauriers ont perdu leur verdeur,

     Le dormir m’est fascheux et long en vostre absence.

Mais les lys fussent blancs, le miel doux, et je pense

     Que la roze et l’œillet ne fussent sans honneur,

     Les mirthes, les lauriers fussent verds ; du labeur

     J’eusse aymé le dormir avecq’ vostre presence,

Que si loin de vos yeux, à regret m’absentant,

     Le corps enduroit seul, estant l’esprit content :

     Laissons le lys, le miel, roses, œilletz desplaire,

Les myrthes, les lauriers dès le printemps fletrir.

     Me nuire le repos, me nuire le dormir,

     Et que tout, hors mis vous, me puisse estre contraire.

Agrippa d’Aubigné / Le Printemps - L’Hécatombe à Diane