« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Riparto d’assalto


 

 

Martelaient leurs bottes le plancher du camion,

Bottes à clous sur le plancher du camion.

Les sergents raides,

Les caporaux irrités.

Les lieutenants pensaient à une putain de Mestre —

Putain chaude et douce et ensommeillée,

Putain confortable, chaude et charmante ;

Maudite montée froide, amère et pourrie,

Routes sinueuses du Grappa.

Les arditi sur des bancs raides et froids,

Fierté de leur pays raides et froids,

Visages mal rasés, peaux sales —

L’infanterie marche, les arditi montent.

Montée grise, froide, amère, sombre —

Vers les pins brisés du Grappa

À Asalone, où le chargement périt.

 

………………

 

Drummed their boots on the camion floor,

Hob-nailed boots on the camion floor.

Sergeants stiff,

Corporals sore.

Lieutenants thought of a Mestre whore —

Warm and soft and sleep whore,

Cozy, warm and lovely whore ;

Damnd cold, bitter, rotten ride,

Winding road up the Grappa side.

Arditi on benches stiff and cold,

Pride of their country stiff and cold,

Bristly faces, dirty hides —

Infantry marches, Arditi rides.

Grey, cold, bitter, sullen ride —

To splitered pines on the Grappa side

At Asalone, where the truck-load died.

Ernest Hemingway / Dix poèmes + Six
traduits par Philippe Blanchon