Quand dans l’obscure signalisation
Par domcorrieras, le vendredi 10 mai 2019 - Poèmes & chansons - lien permanent
Quand dans l’obscure signalisation terrestre
me parviendra la lettre que j’attends
j’aurai beaucoup de peine à déchiffrer mon nom
en dessous des timbres qui recouvrent l’enveloppe
oblitérés d’un cachet de Notre-Dame des Vignes
Je l’ouvrirai dans l’air bleu d’une terrasse
alors que des fleuristes auront baissé leurs rideaux de fer
et qu’une femme passera avec de vieux soleils lessivés
La lettre que j’attends sera comme une barque jamais quittée
quand l’aube s’en allait et revenait par tant de matins
Que ne l’ai-je suivie jusqu’à la noyade
la vivante sirène sur le pavé d’ailleurs
puisque rien ne prévaudra contre elle
qui tant m’aima et moi si peu
◼︎
Ô pont d’Amercœur aux joues de pluie
et aux maigres quartiers
pont ouvert aux poètes qui pleurent
le fleuve détourné de son lit
je te préfère aux autres
conque chantant à mon oreille
Tu me laisses partir parfois
vers des soleils plus froids
et mordre dans l’azur
la bâche ouverte de la nuit
où passent de grands transatlantiques
des chasse-marée et des terre-neuvas
Si peu de lumière sur ton tablier
et si peu de lumière sur ma table
si peu que l’eau et les mots s’en vont
sans s’enrouler autour du corps
de la femme à la chair vive et veuve
trame d’une vie jetée cintre la nuit
une montagne de silence à traverser
Pierre Gilman / Dans la serre poétique