« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Congé

 


 

Je monte sur les montagnes où je me tiens à distance de la chausse-

              trape

de tes gouttes, mer. Je vais sur la glace et la neige,

j’effrite sous mes pas les infinis cristaux hexagonaux,

pour naufrage j’ai l’avalanche et la crevasse,

pour asphyxie l’oxygène qui en haut se raréfie et essouffle.

Je lève le dernier pas qui dépose au sommet

où l’au-delà n’est plus sol, mais air. Maim, shamain, eaux, cieux ;

l’hébreux des déserts remonte de la rime à la substance commune :

              maim, shamaim.

Nous sommes faits de ça, d’eau et d’air, comme les comètes,

mais sans cycle de réapparition et cela suffit

comme réconfort et congé.

Erri de Luca / Œuvre sur l’eau