« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Le loup et le jeune mouton

 



 

    Des moutons étaient en sûreté dans leur parc, les chiens dormaient; et le berger, à l’ombre d’un grand ormeau, jouait de la flûte avec d’autres bergers voisins.

    Un loup affamé vint reconnaître l’état du troupeau.

    Un jeune mouton qui n’avait jamais rien vu, entra en conversation avec lui :

    « Que venez-vous chercher ici ? dit-il au glouton.

    — L’herbe tendre et fleurie, lui répondit le loup. Vous savez que rien n’est plus doux que de paître dans une verte prairie émaillée de fleurs pour apaiser sa faim, et d’aller étancher sa soif dans un clair ruisseau : j’ai trouvé ici l’un et l’autre. Que faut-il davantage ? Je sais me contenter de peu.

    — Est-il donc vrai, repartit le jeune mouton, que vous ne mangez point la chair des animaux, et qu’un peu d’herbe vous suffit? Si cela est, vivons comme frères et paissons ensemble. »

    Aussitôt le mouton sort du parc dans la prairie, où le loup le mit en pièces et l’avala.

    Défiez-vous des belles paroles des gens qui se vantent d’être vertueux. Jugez-en par leurs actions et non par leur discours.

Fénelon / Fables