« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Délivrances - 4 poèmes

 

 

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Sporadique

 

 

Il est de ces jours où nous ne sommes

Ni de bonne ni de mauvaise humeur,

Où tout est indécis, car le temps, las, nous semble,

Insignifiant.

Et, sans chagrin ni joie,

Marchons sans véritabe raison

Parce que ne comptent plus les saisons du passé,

Nous oublions le monde en prenant des distances,

Sur les autres et la vie,

Sur le temps qui nous suit.

 

Il est de ces jours mornes où ne nous tentent

Ni la vie, ni la mort.

 

 

 

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La chute

 

 

Un friselis étrange vient avertir mes sens.

Le long du dos, un souffle léger

Vient rafraîchir ma peau.

Quelle est cette respiration inquiétante

Qui taquine mon repos ?

Quelle est cette fraîche sensation

Qui surprend mon épiderme ?

J’ai froid au fond de mon puits.

Ma tête soudain parait vouloir quitter mon corps,

Peu à peu, je succombe à l’ankylose.

Plus de répit, ni de sursis pour espérer,

Le rêve s’est envolé par-delà les murs.

Déjà le soleil s’est évanoui,

Épargné, dans ce décor déchu, je reste dans mon silence.

Autour de moi, j’entends des anges qui tombent,

J’ai peur.

 

 

 

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À vous… Mademoiselle S.G.

 

 

Parce que vous m’avez plu, et vos yeux sans équivoque,

Par l’impossible sentiment, de vous à moi,

J’étais heureux.

Vous voir à reculons, pour vous aimer en illusions,

J’en suis bien là, à contempler vos grâces.

De tout mon cœur à vos blandices,

Je ne dais rien pouvoir.

des interdits. Du silence.

De vous à moi c’est indicible,

Mais je vous aime à m’émouvoir.

 

 

 

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Sensation du troisième type

 

 

Autour de moi les murs s’épaississent,

La musique résonne et se heurte aux objets.

Mon plafond craquelé, respire béatement,

Les fêlures des murs,

Ressemblent à celles de mon âme.

L’espace est un vide effrayant, pensais-je en me voyant,

Seul au centre de la pièce.

Si mes amis étaient là…

Peut-être sauraient-ils m’aider ?

Pour l’instant je suis esseulé, comme ce marcheur affaibli

Par le poids de ses bagages,

Je lutte fatigué, contre ma solitude.

David Martins / Délivrances
Publié par « Les Dossiers d’Aquitaine » - 2001
Ilustration : peinture Dom Corrieras