Mais toi...
Par domcorrieras, le samedi 8 février 2014 - Poèmes & chansons - lien permanent
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XXII
De la nymphe le chant baisse ici moins sonore,
Note triste et plaintive a fait trembler sa voix,
De ce héros fameux, émue elle déplore,
Comme le sort ingrat doit payer les exploits.
Bélisaire! dit-elle, après tant de victoires,
Quand tu devais sur fortune et sur gloire,
Toi, dont le grand nom était partout vanté,
On te voit misérable, en triste obscurité.
XXIII
Tu as des compagnons, tant en faits mémorables
Comme en ingratitude et lâche traitement,
En l'état le plus humble et le plus misérable,
Comme lui tu seras réduit en vieillissant.
Ceux qui servaient au Roi d'égide tutélaire
Mourir à l'hôpital sur d'indignes litières,
Voilà donc la justice et l'amitié des Rois !
Ces illustres ingrats se croient tous les droits.
XXIV
Les puissants sont ainsi; les fausses apparences
Les trompent aisément; et sans le moindre égard,
Ils privent les Ajax de justes récompenses,
Pour en gratifier les Ulysses bavards.
Quand leur munificence en largesses royales
Se répand quelquefois d'une main libérale,
Ce n'est pas au mérite, au talent, aux grands cœurs,
Presque sans exception, c'est pour de vils flatteurs.
XXV
Mais toi, Monarque injuste, oublieux et coupable,
Envers un tel vassal, seul avare pour lui,
De le voir mendier tu te montres capable
Quand au riche royaume par lui te fut acquis,
Mais tant que de Phébus la lumière féconde
Lancera ses rayons, sache que dans le Monde
Il sera célébré tel héros sans égal,
Et toi, comme un avare et cœur dur et partial.
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Luis de Camoëns / Les Lusiades - Chant dixième (extrait)