« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

SÉJOUR CLUB 2

 

 

 

Le soleil tournait sur les eaux
Entre les bords de la piscine.
Lundi matin, désirs nouveaux ;
Dans l'air flotte une odeur d'urine.

Tout à côté du club enfants,
Une peluche décapitée
Un vieux Tunisien dépité
Un blasphème en montrant les dents.

J'étais inscrit pour des semaines
Dans un parcours relationnel,
Les nuits étaient un long tunnel
Dont je sortais couvert de haine.

Lundi matin, la vie s'installe :
Les cendriers indifférents
Délimitent mes déplacements
Au milieu des zones conviviales.

Dans l'abrutissement qui me tient lieu de grâce
Je vois se dérouler des pelouses immobiles,
Des bâtiments bleutés et des plaisirs stériles
Je suis le chien blessé, le technicien de surface

Et je suis la bouée qui soutient l'enfant mort,
Les chaussures délacées craquelées de soleil
Je suis l'étoile obscure, le moment du réveil
Je suis l'instant présent, je suis le vent du Nord.

Tout a lieu, tout est là, et tout est phénomène
Aucun événement ne semble justifié,
Il faudrait parvenir à un cœur clarifié ;
Un rideau blanc retombe et recouvre la scène.

 

Michel Houellebecq / La poursuite du bonheur IV