COMMENT LES MENSONGES MÛRISSENT
Par domcorrieras, le mardi 11 avril 2017 - Poèmes & chansons - lien permanent
Le premier mensonge que j’ai dit à mon fils tout petit
c’était que oui, le bon Dieu existe,
qu’il aime tous les enfants
et les protège contre tous les malheurs.
Le deuxième
quand il a soudain perdu son grand-père),
que les humains ont en eux quelque chose
appelé « âme » — un petit esprit
qui à la mort, s’envole très haut
jusqu’à un lieu charmant, peuplé de bébés ailés,
appelé Paradis.
Quand ils veulent nous parler
ils descendent sur terre
viennent la nuit dans nos rêves,
nous accompagnent jusqu’au matin.
(Sur l’Enfer, les flammes, les marmites, je n’ai rien dit.)
Le troisième
(le jour où il fondit en larmes
à l’idée qu’un jour il me perdrait),
que je serais avec lui pendant plein, plein, plein d’années encore !
et qu’au moment de le quitter
je serais devenu un petit vieux édenté
« avec une bosse comme Carabosse ».
(Il a éclaté de rire.)
Le quatrième
quand il m’a demandé
si mon père à moi…
C’est ainsi que mûrissent les mensonges
et quand le fils ne les croit plus
on se les dit à soi-même pour ne pas mourir
de la vérité.
Haris Vlavianos / L’Ange de l’histoire