« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

LVII - LE PASSÉ QUI SURVIT


 

    

 

 

 

    Je laisserai le lit comme elle l’a laissé, défait et rompu, les draps mêlés, afin que la forme de son corps reste empreinte à côté du mien.

 

    Jusqu’à demain je n’irai as au bain, je ne porterai pas de vêtements et je ne peignerai pas mes cheveux, de peur d’effacer les caresses.

 

    Ce matin, je ne mangerai pas, ni ce soir, et sur mes lèvres je ne mettrai ni rouge ni poudre, afin que son baiser demeure.

 

    Je laisserai les volets clos et je n’ouvrirai pas la porte, de peur que le souvenir resté ne s’en aille avec le vent.

Pierre Louÿs. Les Chansons de Bilitis / Élégies à Mytilène