Rires et larmes d'un enfant noir
Par domcorrieras, le samedi 25 mars 2023 - Poèmes & chansons - lien permanent
Un enfant noir contre nature a mille ressources, dans sa lutte contre les saisons plus d'un atout, dans sa fa!on d'aspirer toute la vie qui naît du majestueux soleil, de tous les rocs polaires, une force, une joie, un appétit, une coquetterie qui fait pâlir la lionne fantaisie de la forêt abritant de frêles arbres.
L'enfant noir crie quand vient tomber sur sa peau douce et pure comme l'eau de source que les rocs ont filtrée le jour qu'un horloger avare distribue e compte-gouttes.
L'enfant noir crie et demande que son corps, le diamant de sa peau qui illumine ses nuits se substitue au soleil inconstant
L'enfant noir demande que sa peau plus riche qu'un ciel de fête de Noël prenne la direction d'un monde enténébré par la fumée qui monte des couches de l'or.
C'est pour cela que de tout temps rit l'enfant noir.
C'est l'argument de son sourire, la source inépuisable de la plus grade bonté, quelque chose qui ressemble à la racine même de la vie. Ni vouloir de dominateur. Ni soin calculé de charmé Ni stupide besoin d'amuser.
L'enfant noir rit avec ses pores au moment où s'annonce l'aurore.
L'enfant noir offre ses cheveux à l'aube qui égrène chaque matin un jour nouveau sur tous les peuples.
Et l'aube est désarmée car les cheveux d'un enfant noir sont un chapelet interminable C'est le miroir des jours qui naissent indéfiniment, interminablement.
Les cheveux de l'enfant noir, c'est le matin qu'ils sont beaux quand le songe les a arrimés comme des grains de poivre l'un à côté de l'autre.
C'est un présent du plus insoutenable soleil.
Les cheveux de l'enfant noir ont eu la confidence des temps
Mais l'enfant noir pleure
parce que le jour épuise comme un ennemi
parce que la faim met à l'épreuve tous ses sens
innocents
parce qu'un buisson court-circuité devient
monstrueux dans un songe et ressurgit plus
impérieux le matin
parce que le pain du matin jusqu'au soir n'est
pas rentré dans la maison
parce que les huissiers ont sommé son père de
déloger
parce que l'instituteur l'a fouetté pour une leçon
oubliée sous l'emprise de la faim
Et puis ses camarades ont ri de la plante de ses pieds; les semelles ont cédé avant la fin de l'année
Et puis ses lèvres sont blanches car depuis le matin elles n'ont reçu que de 'eau pour l'office de ses dents
Et puis l'enfant a transpiré toute la nuit et ses genoux sont faibles
L'année s'écoulera
Un autre Noël viendra sans surprise sans cadeau
Et la fête des Saints Innocents aussi
Et le premier jour de l'an aussi
Mais la maison n'est toujours pas payée
Et les banquiers sont impatients
Et l'enfant noir en sortant de l'école s'arrête devant les vitrines, regarde les jouets, et les narines rappellent le souvenir d'un nouvel an, rappellent un plat préparé par la mère, la mère infatigable, la seule magie de la maison, la mère qui fait réciter les leçons avant de prendre sa bible pour implorer la grâce, la mère exemplaire, la mère invaincue, la mère qui tient tête à toutes les saisons aux monstres des banques, aux lois des tribunaux
Et cette mère apprend à l'enfant l'oubli des soucis le secret de toute force
Elle apprend aussi à l'enfant à désirer en tout temps la puissance
Cette mère s'est installée dans son enfant pour boire ses larmes, pour lui apprendre à rire, à désirer invinciblement
Et puis à l'enfant elle a dit : Deux ruisseaux sur es joues sont creusées le long de mes narine pour pleurer à ta place et je te lègue toute ma fore de rire pour l'avenir
Jean Métellus / Au pipirite chantant