« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

De cette vie qui bouillonnait ici


 

 

De cette vie qui bouillonnait ici,

Des flots de sang qui ont coulé,

Que nous est-il resté, qu'est-il demeuré ?

Deux ou trois minutes que l'on voit aujourd'hui…

 

Voilà deux ou trois chênes qui dessus ont poussé,

Déployant leurs ramures vastes et fières,

Ils bruissent, se pavanent, et ne se soucient guère

Des cendres dans lesquelles leurs racines sont plantés.

 

La nature ne veut rien savoir du passé,

Elle se moque bien de nos vies illusoires,

Face à elle nous vient confusément l'idée

Que nous ne sommes qu'un rêve qu'elle croit voir.

 

L'un après l'autre, tous enfants,

Quand ils ont accompli leurs futiles hauts faits,

Elle les accueille en son gouffre sans fond

Qui dévore toute chose et approuve la paix.

 

17 août 1871

Fiodor Tiouttchev / Poèmes
traduit du russe par Sophie Benech