« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Le don


 

 

Légèrement au-dessus

de la colère intestine

de la mère

les poches du père —

profondeur

invisible          interminable

d'où surgissent les richesses

et une sinistre

guerre économique

 

Logis couvert et feu

proviennent d'elles

et sur elles

il claironne sans arrêt

 

Proximité

de l'idée forgée dans le crâne d'Ova

que l'argent par magie

EST la vie

 

Il lui dit

qu'il est un bon Père

que son enfant doit lui obéir

et que s'il le veut bien

il pourra lui accorder

tout ce qu'elle souhaite

 

Il lui semble souverain

Le maximum

d'argent

Pieuvre d'or

cupide

Elle demande

un souverain

pour acheter un cirque univers

 

Riant

il lui donne une pièce rutilante

 

L'expérience spontanée de la beauté

la transporte

 

Elle est confrontée

par son auguste parent

à la résolution de sa destinée

et soudain à l'éventualité

de son accomplissement

 

« j'achète tout ça mon souverain »

 

La fleuriste

est stupéfaite

 

La nurse doute

 

Elle tend

la paume nacrée de sa main ouverte

pour qu'elles comprennent

 

« Allons donc — petite folle

de qui te moques-tu ?

C'est un simple sou ! »

 

Elle s'arrête

à la vue d'une femme assise

sur un trottoir

au-delà

l'éclat exubérant

des jonquilles d'avril

jaune Gala

 

Comme un père doit être mauvais

pour crever un univers allant

si loin pour son souverain

Mina Loy / Il n'est ni vie ni mort - Poésie complète
traduit de l'anglais par Olivier Apert