« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Les vilains bonshommes


 

 

La pire restait à venir après

la découverte de l'Amérique

qui mit à mal la bonté des créatures

sous la férule d'un dieu crucifié

 

La machine à faire l'amour

tournait tournait

comme les têtes tombaient

pendant le thermidor

de la révolution française

 

les gracieux troubadours

s'en étaient allés

depuis longtemps déjà

vers d'autres cieux

 

les générations passèrent

comme le fer à repasser

sur le tissu froissé

du pantalon d'un général

 

les puces envahirent la terre

pénétrèrent les terres le sang

les cerveaux les pensées

en éliminant les réticents

 

Désormais seul comptait

l'ordre sécuritaire l'ordre sanitaire

le soleil bientôt

serait l'ennemi mortel.

 

La machine à faire l'amour

se transformait de frustrations en équations

en une mécanique guerrière amoureuse de poésie

cantatrice chauve pour les sourds

 

le poème filait filait filait

s'enfuyait à travers champs de coton

quand le fouet la sueur et les larmes

s'exprimaient des paroles du blues

 

retrouverons-nous un jour

notre perception d'enfance

qui nous révélait sans l'ombre d'un doute

les vilains bonhommes ensanglantés.

André Chenet / Buenos Airès, juin 20022