« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Le terrier


 

 

Certains jours, je voudrais

laver ma vie à grande eau  :

qu’un mur de pluie s’abatte

sur cette pièce où s’entassent

les plinthes, les moindres recoins, la bête.

Derrière tous les autres mots était tapi celui-ci.

Et pas de fascination.    

 

L’esprit aménagera sa pièce comme un terrier,

mais on la débusquera,

on la traînera dehors, la bête,

en pleine nuit, sur la place publique,

et l’on invectivera

les poils ternes qui couvrent ses yeux

- il faut se persuader                 

que rien ne dégouline dans l’âme -.    

 

Elle écoute,

se couche sur la pierre demander grâce  :

que l’on voit enfin son œil

et la béatitude d’un verset

qui la parcourrait.

 

Alors, dans le terrier, elles seraient seules  :

- la bête et la poésie, la poésie et la bête -

impossible d’aller ailleurs

que dans ces pièces les plus reculées

où la vie baignerait.

Marie Alcance / Devant l’ailleurs