Attribut des pigeons
Par domcorrieras, le lundi 23 mai 2022 - Poèmes & chansons - lien permanent
Les pigeons somnolent
ou déploient
le crescendo zébré
de leurs arcs-en-ciel gris
c'est une frise vivante sur le mince
rebord d'une fenêtre d'usine.
Les pigeons surgissent,
se posent
sur les fondations verticales
de la brique civique
blanchies par les avalanches
de leurs innocents excréments
comme si un ange avait vomi ;
voilà tout ce qui nous est montré
de l'économie des oiseaux,
sans ressource
aussi peu visible que l'évaluation
de leurs cadavres.
Les pigeons modulent une musique irritante,
séduisante ;
solfèges empennés
d'ailes stridentes qui sélectionnent
le fanatisme enjôleur roucouleur
de leur cour d'amour.
Leurs radotages
du dolce de la voix.
Allant et venant, téméraires ils vivent
lissant l'un contre l'autre
leurs gorges magnifiques
dans la danse plumeuse
des préliminaires
à leurs unions.
Les pigeons disparaissent,
leurs pattes, trains de corail,
atterrissent sur les marches d'autel
de leurs intimités —
un morceau de béton
tombé d'une corniche
les conduit dans l'obscurité ;
la contiguïté fissurée des maisons
où les poussières caressantes,
le résidu des fourneaux
tapissent les festons des
toiles d'araignées
du mobilier nuptial
Les pigeons selon quelque procédé magique
apparaissent pour mieux réapparaître
sur les marches d'autel
aux moments les plus imprévus
par les torses
immatures de leurs enfants géants ;
timides et ne sachant voler
dénués de plumes
naïfs dans la nativité
scrutant l'immense transparence.
Mina Loy / Il n'est ni vie ni mort - Poésie complète
traduit de l'anglais par Olivier Apert