J'ai
Par domcorrieras, le mercredi 19 mai 2021 - Proses & autres textes - lien permanent
J'ai, enfin, là, devant moi les tendresses du taureau, chacune pèse 350 grammes. C'est ferme comme un sein de jeune négresse. (Pas d'odeur.)
— Mais la couleur du miel.
— Puisque vous les vouliez, m'a dit le boucher, les voilà ! C'est un garçon très bien, le boucher, un amateur d'histoires. Il lit beaucoup. C'est lui qui m'a dit, une fois, vos dessins s'apparentent à ceux de Michaux. Cette observation m'avait ému fortement. Ce boucher, qui habite Saint-Sylvain, est devenu un ami. Fort de cela, un jour je lui dis, carrément, « moi, mon cher monsieur, j'aimerais manger des testicules de taureau ».
— Ah, pas possible !
— Si je vous le dis !
— Bon. si un jour, j'en tue un, je garde les bourses pour vous.
— C'est d'accord, monsieur.
Il vient me voir deux fois par semaine, le mercredi midi et le vendredi soir. tous les mercredis, tous les vendredis, je lui répétais :
— Monsieur, et mes couilles ?
— Rien en vue, me répondait-il.
On parlait. C'est lui qui m'a appris que le nerf de bœuf c'est, tout simplement, la verge du taureau.
— Elle est bien longue cette verge !
— On l'étire avec un poids.
— Ah, bon.
Mon boucher n'ignore pas qui est Michaux, moi je ne savais pas, mais pas du tout, que le « nerf » est un sexe.
(à suivre).
Jules Mougin / Au jour le jour / La grande Halourde
Illustration : collage de Jules Mougin