Villa 31
Par domcorrieras, le jeudi 29 octobre 2020 - Poèmes & chansons - lien permanent
J'ai cheminé une bonne quarantaine de kilomètres
aujourd'hui dans mon territoire d'élection sans limites
par rapport auquel la superficie de Paris capitale des gaules
ne correspondrait qu'à celle d'un moindre de ses quartiers (barrios)
J'ai fait une halte dans un bidonville (villa - prononcé vija en argentin))
peuplé de 600 000 ou de 700 000 habitants
sis au coeur de cette mégapole qui fait mes délices
Un lieu peuplé par tous les réprouvés plus ou moins illicites
amérindiens du Paraguay, de Bolivie, d'Equateur
ou d'exilés des provinces les plus pauvres d'Argentine
un lieu de sangs mêlés descendant des esclaves
et des crimes de l'Europe conquérante
un lieu criblé de ténèbres
mais aussi de bonté divine
un lieu de rebelles où la police se fait discrète
un lieu unique où prospèrent les gangs et les anges noirs
qui font aujourd'hui les beaux jours de nos démocraties
aux refrains libidineux des "droits de l'homme" made in USA.
Un lieu où ne se risquent guère les citoyens ordinaires
Buenos Aires je t'aime infiniment, tellement
en dépit du fascisme qui occulte maintenant ta danse et tes coutumes
Buenos Aires où j'ai trouvé mon invisibilité ma vertu
parce que ta densité est telle
qu'il faudrait tout un ciel étoilé pour te décrire
sauf que les astres ici ne s'inscrivent guère dans notre quotidien
à cause de ton hystérie électrique
et de cette brume maudite de pollution permanente
Seule la lune légendaire de l'avenue Callao t'illumine
à travers tes tangos immortels
et le fantôme du vieil aveugle chemine toujours
dans les rues de Palermo où pullulent
des tribus d'homosexuels, de petit bourgeois écologistes
Hola querido Jorge Luis como estas?
- "La vie est un grand hymne de jouissance" (Jorge Luis Borges).
André Chenet, 02 sept. 2020