Or voici que se découvrent d’autres voix
Par domcorrieras, le jeudi 14 mai 2020 - Poèmes & chansons - lien permanent
Or voici que se découvrent d’autres voix par d’autres enflammées
Les cendres d’une peur qui fera récit
Voix chevillées au corps
Existe-t-il droit de s’engager en leurs sens interdits ?
Depuis d’autres éteintes et oubliées
Elles appartiennent au trébuchement
Premier croche-patte de l’être humain
Qui désigna un arbre
Index au bout de son bras
Le vrai de ce qu’il veut montrer
Quand la parole lui manque encore
Ceci est un arbre
Et cet arbre va exister parce qu’il n’est pas en mesure de lui parler
De dire qui il est
Dans la violence et l’impuissance du geste affaibli des branches
Il ne porte nom
Sinon ses fruits
Ceci est un arbre
Ainsi naquirent paroles
D’un geste
D’un silence interrompu
Au bout de l’index un râle
Ainsi fut créée la bibliothèque première
Mots des animaux en leur langage
Répétés dans la vibration de l’index
Ceci est un arbre
Ceci est l’arbre où nous nous sommes protégés
Des dents du tigre
Et l’attente a vibré de ce qu’il adviendrait
A chaque coup de dents dans le tronc
Un mot vibrement désormais et libre de ses horizons humains
À chaque attaque incisive
Une phrase s’inscrit dans le peu des écritures
À chaque accrochage meurtrier un paragraphe
À chaque morsure une ponctuation
À chaque attaque des griffes une poésie s’écrit
À chaque grognement de rage impuissante un chapitre
Dans le peut-être d’un livre
Depuis le silence des silex
Broiement des écorces d’un bouleau
Nous en ferons une pulpe une encre
À raconter histoires populaires
Romans de gare
D’où partent des trains que nous ne prendrons pas ou que nous avons ratés
Depuis un quai oublié
Trains pris dans le froid des discours
Crissement des roues sur les rails
Acier contre acier
Le wagon s’arrête pour un autre ailleurs
Une Sibérie si proche
Dans le bruit noir et blanc où nous marchions pieds-nus
Bruissement en vapeur blanche
Des rails et de la nuit
Montent les étincelles
Le tigre veille au pied de l’arbre
Pascal Giovannetti